Les entreprises ciblent constamment les consommateurs pour réaliser des ventes et maximiser leurs profits. Les besoins réels du consommateur ne sont pas toujours pris en considération et peuvent être manipulés à des fins marketing et commerciaux. En exploitant les techniques issues du marketing traditionnel et du neuromarketing, les géants de l’industrie peuvent influencer la décision d’achat du consommateur. Certaines entreprises poussent le vice jusqu’à adopter des stratégies de marketing agressif à travers des promotions push, des messages répétés, des publicités comparatives dans le but d’inciter les clients à des achats immédiats. Pour ce faire, elles exploitent des biais psychologiques et des mécanismes inconscients au détriment du consommateur.
Mon objectif ? Sensibiliser les entreprises pour qu’elles puissent recourir à des méthodes plus justes, probes et éthiques afin de développer une image respectée de la marque employeur auprès des clients. Dans le cadre d’une démarche win-win, le consommateur se verra aussi garanti d’une plus grande liberté dans ses choix individuels.
Comment la prise de décision du consommateur peut-elle être manipulée ?
Le consommateur traite une information cognitive selon son propre registre de perception et de croyance. Cette perception va impacter son jugement, ce qui mènera inéluctablement à une erreur. C’est ce qu’on appelle plus communément, un biais cognitif. Un biais est donc une déformation de la pensée logique et rationnelle du consommateur par rapport à la réalité.
Jusqu’à présent, 250 biais cognitifs ont été recensés et classifiés de la manière suivante : https://inertian.wixsite.com/codexbiais
Les biais les plus couramment exploités par les entreprises seront mis en exergue afin de justifier leur influence sur la décision d’achat du consommateur.
Comment le neuromarketing peut-il exploiter les biais cognitifs ?
A l’ère du digital, les entreprises font de plus en plus appel au neuromarketing qui exploite les biais psychologiques pour capter l’attention du consommateur. Le neuromarketing est une évolution du marketing traditionnel qui prend en compte, dans son équation l’aspect scientifique et stratégique de persuasion pour inciter le client à l’action.
Le neuromarketing utilise des méthodes scientifiques et des outils de mesure tels que l’IRM et l’EEG pour étudier les zones du cerveau stimulées par la publicité.
La discipline scientifique, conciliant neurosciences cognitives et marketing, a vu le jour dans les années 2000 suite aux recherches menées par le neurologue américain Read Montague. Le neuromarketing a pour objectif de retracer le parcours utilisateur et de comprendre le comportement du client.
Le tunnel de conversion traditionnel fait appel aux stratégies neuromarketing pour attirer, engager, convertir et fidéliser le potentiel client. Un tunnel de conversion, bien construit, peut exploiter suffisamment de biais cognitifs pour actionner le bouton d’achat virtuel, le buy button qui se trouverait dans le cerveau du consommateur.
Les différentes étapes du tunnel de conversion donnent une plus grande visibilité aux entreprises sur le type de stratégie à mettre en place afin d’achalander et de rentabiliser les ventes. Tout au long du parcours utilisateur, le consommateur est amené à adopter un comportement irrationnel reposant sur des constructions mentales inconscientes et émotionnelles.
A l’heure d’aujourd’hui, le neuromarketing est le terreau du marketing agressif grâce aux données neuroscientifiques exploitables dans le cadre de campagnes publicitaires agressives.
Afin d’analyser l’influence du neuromarketing sur le marketing agressif, faisons un bond dans les années 1900 pour comprendre les mécanismes psychologiques et les biais cognitifs utilisés intuitivement dans le marketing traditionnel par les grandes marques.
Comment Pepsi et Coca-Cola font appel à des mécanismes du neuromarketing dès le 18ème siècle ?
Les grandes marques pionnières telles que Coca-Cola et Pepsi ont su exploiter le plein potentiel des biais cognitifs dans le cadre de leurs campagnes publicitaires bien avant la démocratisation du neuromarketing et des techniques de persuasion qui en découlent.
Entrons au cœur de la grande bataille des années 90
entre les deux géants de la boisson
Dès le début des années 1900, Coca-Cola et Pepsi sont connus pour leur influence sur les stimuli sensoriels et leur matraquage par le biais de canaux de communication traditionnels tels que les affiches out of home, la radio et les spots télévisés.
Le rôle de l’effet d’ancrage dans une stratégie de bundling
Les entreprises utilisent l’effet d’ancrage dans leurs stratégies de prix pour influencer le jugement des consommateurs. Ce mécanisme repose sur l’idée que la première information perçue, comme un prix initial, sert de référence dans le processus d’achat du client.
Une pratique courante consiste à afficher le prix « réduit » à côté du prix « initial » pour un produit donné.
Coca-Cola et Pepsi font appel à l’effet d’ancrage pour mettre en place une stratégie de bundling : un groupement de plusieurs produits vendus en lot à un prix réduit.
Les deux grands titans proposent régulièrement des lots de produits, des bundles pour que le consommateur compare le prix unitaire d’un soda avec celui vendu dans un lot. Le prix d’achat d’un lot étant plus avantageux que l’achat d’un soda à l’unité, le consommateur privilégie l’achat d’un pack de soda, le percevant comme une bonne affaire.
Le Pepsi Challenge, un blind test à double tranchant
Le test à l’aveugle, lancé en 1975 à l’échelle mondiale, révèle que 75 % des participants préfèrent le goût de Pepsi à celui de Coca-Cola. Pepsi intensifie ses campagnes publicitaires agressives en y intégrant la preuve sociale, avec plus de 80 publicités comparatives pour démontrer la supériorité de son soda sur celui de Coca-Cola. Cette rivalité féroce stimule un marketing de plus en plus agressif qui sera exploré en détail par la suite.
Coca-Cola, craignant un chiffre d’affaires en chute libre, adopte un positionnement risqué en créant une nouvelle identité de marque pour son produit phare, le Coke. Le verdict tombe très rapidement, les consommateurs sont frileux à l’idée de consommer le New Coke, un soda rebrandé. L’arrivée du New Coke soulèvera une vague d’indignation : les clients feront part de leur mécontentement en boycottant la marque.
Le biais cognitif de familiarité a complètement échappé à Coca-Cola. Les clients s’identifient aux valeurs positives (stabilité, bonne humeur, joie, fraîcheur…) de la marque lorsqu’ils consomment la boisson. Par ricochet, Coca-Cola rétropédale et propose à l’achat l’ancienne version du soda qui arbore le nom « Coca Cola Classic » tout en faisant entrer le New Coke dans sa phase de déclin jusqu’à son retrait de la vente.
Malgré ses multiples déboires, Coca-Cola a tenu tête à Pepsi en récupérant ses parts de marché.
L’influence de Pepsi sur les clients fidèles de Coca-Cola a été moindre bien que la marque ait tenté de se démarquer de son concurrent en mettant en avant la supériorité du goût de son soda grâce à ses blinds tests.
Certains biais et mécanismes psychologiques n’ont pas été identifiés par Pepsi pour adopter un positionnement marketing fort face à Coca-Cola :
- Le biais de statu quo : La majorité des adeptes de Coca-Cola ont suspecté la marque Pepsi d’avoir ajouté une substance pour adultérer le goût de sa boisson. Par conséquent, l’aversion au risque a poussé les consommateurs réguliers du Coke à maintenir leurs habitudes de consommation. Pour éviter un tel renversement de situation, Pepsi aurait pu vendre ses sodas à prix réduit à l’issue du blind test. Les tests à l’aveugle auraient ainsi été un nudge pour encourager l’achat immédiat d’un soda Pepsi.
- Le biais de familiarité : Les consommateurs de Coca-Cola n’étaient pas suffisamment habitués à l’image de marque et aux valeurs de Pepsi. En l’absence d’un lien émotionnel fort, les clients sont très vite retournés à leurs habitudes initiales. Pour faire face aux aléas moraux, Pepsi aurait pu recourir à une stratégie de fidélisation dans le cadre d’un programme de fidélité à travers des lead magnets : des jetons en cuivre ou des vignettes promotionnelles pour engager davantage et fidéliser durablement ces consommateurs.
L’influence de l’identité sociale sur le branding
La combinaison, familiarité et preuve sociale a pris de l’ampleur dans la lutte publicitaire qui implique Coca-Cola et Pepsi. Les deux géants ciblent toutes les classes sociales pour gagner des parts de marché importantes. Leur leitmotiv : marquer les esprits et entrer dans l’imaginaire collectif des clients par tous les canaux de communication possibles.
Le biais de familiarité est fortement influencé par l’identité sociale du public ciblé. Les entreprises de la boisson créent un sentiment de familiarité chez le potentiel client en multipliant les affiches publicitaires en lien avec son statut social, sa profession exercée, son loisir et ses intérêts personnels.
La preuve sociale, à son tour, est placée dans de nombreuses affiches Pepsi et Coca-Cola pour communiquer sur des valeurs positives des sodas auprès de consommateurs frileux et indécis. Ce processus psychologique s’appuie sur la satisfaction de précédents acheteurs et consommateurs qualifiés qui valorisent la marque en témoignant de l’impact positif des boissons auprès de ceux qui partagent le même statut social que ces derniers.
La culture populaire au service de la campagne publicitaire
Coca-Cola et Pepsi ont étendu leur influence en recourant au marketing d’influence et au marketing expérientiel.
- Coca-Cola a renforcé son image de marque grâce à une campagne publicitaire mondiale qui devient virale, en s’appropriant la figure du Père Noël. Dans les années 1930, le soda était consommé ordinairement en été et a vu ses ventes chutées drastiquement en hiver. Coca-Cola a su renverser la situation à son avantage en faisant de Santa Claus, son égérie à l’échelle mondiale. La marque a popularisé l’image d’un Père Noël rondouillard, avec un air joyeux et buvant du Coca-Cola, et le tout vêtu des couleurs de la marque : rouge et blanc.
- Pepsi réplique et, à son tour, veut toucher la cible jeune. La marque exploite la même stratégie d’influence que son éternel rival, Coca-Cola en recourant à Michael Jackson. Une collaboration est établie entre le Roi de la pop et Pepsi pour lancer une grande campagne publicitaire à travers le monde. En s’appropriant l’image d’une grande star de la culture pop, Pepsi a failli couler Coca-Cola. Cela dit, Coca-Cola a survécu et rayonne à travers le monde.
Les deux grandes industries de la boisson ont adopté de nombreuses stratégies marketing faisant appel aux biais cognitifs et aux mécanismes psychologiques sans comprendre leur portée réelle et leur implication future sur le neuromarketing.
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Sources :
Liens :
https://cocacolaweb.fr/new-coke-lhistoire-dun-echec/
https://www.usabilis.com/definition-biais-cognitifs/
https://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire/neuromarketing-254948.html
https://www.soft-concept.com/surveymag/lere-du-neuromarketing.html
https://www.mentalfloss.com/article/85231/fizzled-out-new-coke-protests-1985
Documentation :
Replay Pepsi vs Coca : la guerre est déclarée :