Lâunivers du jeu vidĂ©o indĂ©pendant regorge de crĂ©ateurs et crĂ©atrices passionnĂ©(e)s, prĂȘt(e)s Ă braver les contraintes budgĂ©taires et techniques pour donner vie Ă des expĂ©riences uniques.
Contrairement aux blockbusters du jeu vidéo, ces développeur(euse)s travaillent souvent avec des équipes réduites ou bien seul(e), jonglent avec les défis du financement et doivent redoubler de créativité pour se faire une place sur un marché ultra-concurrentiel. Pourtant, certain(e)s parviennent à tirer leur épingle du jeu et à marquer les esprits.
Plongez avec nous dans les coulisses du jeu vidĂ©o indĂ©pendant et dĂ©couvrez dĂšs Ă prĂ©sent Doot, l’un des trois dĂ©veloppeurs qui nous partage son parcours, ses dĂ©fis rencontrĂ©s au quotidien et surtout, ses stratĂ©gies pour sĂ©duire son public face aux gĂ©ants de lâindustrie.
1) Merci d’avoir acceptĂ© l’interview ! Tout d’abord prĂ©sente-toi et parle-nous de tes jeux vidĂ©o
Salut, moi c’est Doot ! Je suis dĂ©veloppeur indĂ©pendant depuis 2 ans. Avant ça, j’ai travaillĂ© 5 ans en tant que Data Scientist dont 3 ans dans le dĂ©partement Ă©tudes de marchĂ© d’Ubisoft. J’ai ensuite repris les Ă©tudes et fait une alternance en tant que Gameplay Programmer chez le studio de JV Homo Ludens.
En deux ans, j’ai sorti deux jeux : Froggy’s Battle et Minami Lane et actuellement je travaille sur le troisiĂšme Kabuto Park.
Sur ces trois jeux j’ai travaillĂ© avec Zakku qui s’est occupĂ© de la musique et des sons. Sur Minami Lane c’est Blibloop, illustratrice, qui a assurĂ© toute la direction crĂ©ative, fait tous les assets graphiques du jeu ainsi qu’une partie du game design.
Je suis un fervent défenseur des petits jeux, que je trouve à la fois plus intéressant et beaucoup plus sains à produire !

Mon dernier jeu vidĂ©o Minami Lane est un petit jeu mignon de gestion de rue, il a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ© en un peu moins de 6 mois. Blibloop et moi travaillions Ă temps plein dessus et Zakku a rĂ©alisĂ© la musique et les sons en parallĂšle d’autres projets. Nous avons Ă©tĂ© accompagnĂ©s par Wholesome Games pour le marketing et la communication sur la fin du projet.
Minami Lane est un Ă©norme succĂšs commercial, largement au-delĂ de nos attentes. Le jeu est sorti sur Steam et Nintendo Switch, et ses ventes cumulĂ©es approchent des 300 000 exemplaires un peu plus d’un an aprĂšs la sortie.
Mon jeu en cours de dĂ©veloppement, Kabuto Park, est un petit jeu mignon de collection et combats d’insectes. Il sort le 28 mai et est aujourd’hui proche des 12 000 wishlists sur Steam.
2) Combien de temps consacres-tu Ă faire la promotion de ton jeu ?
J’ai passĂ© environ 1/4 de mon temps de travail sur la communication de mon premier jeu, Froggy’s Battle. J’estime que c’est Ă peu prĂšs le mĂȘme ratio sur Kabuto Park et lĂ©gĂšrement moins pour Minami Lane car nous Ă©tions deux Ă nous en occuper.
Cela peut se prĂ©senter sous diffĂ©rentes forme, comme la promotion sur les rĂ©seaux sociaux, des inscriptions Ă des Ă©vĂ©nements, la prĂ©paration d’assets marketing ou de trailers, la prise de contacts avec les crĂ©ateurs et crĂ©atrices de contenu ou bien d’autres formes encore.
Ce temps est lĂ©gĂšrement variable Ă diffĂ©rentes Ă©tapes de vie du projet mais j’essaie de communiquer en continu.
Aussi, comme je fais des petits jeux et que je n’ai pas envie de recommencer la communication Ă 0 pour chacun, je communique autant sur mon jeu que sur moi en tant que dĂ©veloppeur (Doot). Par exemple, tous mes comptes sur les rĂ©seaux sont Ă mon nom, je n’ai pas de comptes spĂ©cifiques aux jeux.

3) Quel(s) media(s) utilises-tu pour faire connaßtre ton jeu ? Et quel est ton préféré ? Pourquoi ?
Voici un résumé des plus importants :
đž Twitter (X) / Bluesky / Threads : Ce sont les principaux rĂ©seaux que j’utilise pour communiquer au quotidien (je publie principalement sur Twitter puis je duplique mes posts sur les autres canaux). Je suis trĂšs Ă l’aise dans leur utilisation et je les trouve trĂšs efficace pour assurer une prĂ©sence en ligne lorsque l’on poste dessus trĂšs rĂ©guliĂšrement.
đž Twitch : Je streame une fois par semaine. CĂŽtĂ© communication, cela a commencĂ© Ă crĂ©er une communautĂ© trĂšs engagĂ©e avec le temps, mais j’y trouve surtout beaucoup d’autres intĂ©rĂȘts, en particulier une prise de recul rĂ©guliĂšre sur mon travail.
đž Discord : J’ai un Discord pour les discussions sur nos jeux et l’organisation de playtests. Je l’anime peu, mais les gens sont trĂšs rĂ©actifs aux annonces donc c’est un outil trĂšs pratique pour moi.
đž Instagram / Tiktok / Reddit : J’utilise moins ces plateformes lĂ . Instagram me sert pour les stories et quelques posts, Tiktok est trĂšs chronophage et j’ai peu de succĂšs dessus. J’utilise Reddit tous les quelques mois pour des gros post mortems.
đž Patreon : Il me sert principalement de blog Ă©crit pour des posts mensuels mais je l’utilise trĂšs peu.
4) Quel media t’a apportĂ© le plus d’interaction ?
Twitter (X), de trĂšs loin. C’est celui sur lequel j’ai le plus construit une communautĂ© et son algorithme fait exploser mes posts rĂ©guliĂšrement.
En ce moment, la transition vers Bluesky marche plutĂŽt bien et j’en suis content car j’aimerais bien quitter Twitter, mais il reste trĂšs important pour moi.
5) Quel(s) media(s) rĂȘverais-tu d’utiliser pour mettre en avant ton jeu ?
Si j’avais beaucoup plus de temps, j’aimerais bien faire des devlogs vidĂ©os sur Youtube, mais c’est trĂšs trĂšs chronophage et j’ai dĂ©cidĂ© de laisser ça de cĂŽtĂ©.
6) As-tu dĂ©jĂ proposĂ© un playtest de ton jeu, ou bien, lâas-tu dĂ©jĂ envisagĂ© ? Pourquoi ?
Les playtests sont extrĂȘmement importants dans le dĂ©veloppement de mes jeux, j’en fait environ un par mois. Non seulement je pense qu’on ne peut pas faire un bon jeu sans, mais aussi ils aident Ă©normĂ©ment Ă prioriser, ce qui est souvent un des aspects les plus durs du dĂ©veloppement d’un jeu vidĂ©o.
7) Que penses-tu des jeux en early-access ?
Aujourd’hui, les attentes sur une sortie d’un jeu en early access sont Ă©normes, il faut avoir un jeu aussi bon qu’un jeu qui sortirait sans early access si on veut avoir une chance. En plus de ça, l’early access engage Ă continuer Ă travailler sur le jeu aprĂšs sa sortie, et c’est quelque chose qui ne me donne vraiment pas envie.
J’aime passer aux prochains projets rapidement. L’early access peut ĂȘtre intĂ©ressant pour rĂ©colter des retours diffĂ©remment des playtests, mais je n’en ressens pas le besoin sur mes petits jeux et je n’y vois que des dĂ©fauts.
8) Est-ce que tu as dĂ©jĂ partagĂ© ta dĂ©mo pendant le Steam Next Fest ? Si non, aimerais-tu le faire ? Si oui, est-ce que cela t’a apportĂ© quelque chose ?
Oui, mes trois jeux ont chacun participĂ© Ă un Steam Next Fest avant leur sortie. C’est un Ă©vĂ©nement trĂšs efficace et peu coĂ»teux, ça me paraĂźt indispensable d’en faire un avant la sortie d’un jeu indĂ©pendant. Pour chacun de mes jeux, le Steam Next Fest a fait doubler les wishlists ou plus, et a permis Ă une premiĂšre vague de crĂ©ateurs et crĂ©atrices de contenu de dĂ©couvrir les jeux.
9) As-tu dĂ©jĂ fait du contenu sponsorisĂ© ? Si oui, lequel ? Est-ce que cela t’a apportĂ© quelque chose ?
Non, je n’ai jamais fait de contenu sponsorisĂ©. J’essaierai peut ĂȘtre un jour, mais j’ai l’impression que forcer la visibilitĂ© n’est pas trop une bonne chose.
10) Est-ce compliquĂ© aujourdâhui dâĂ©merger parmi autant de titres qui sortent chaque annĂ©e ? Comment peut-on se dĂ©marquer ?
Oui, c’est dur, c’est pour ça que c’est quasiment impossible de gagner sa vie en tant que dĂ©veloppeur indĂ©pendant Ă temps plein, et on a eu Ă©normĂ©ment de chance avec Minami Lane.
Pour augmenter mes chances, j’essaie d’avoir une cible bien dĂ©finie, un pitch clair, cohĂ©rent et attractif et une DA attirante. Je poste Ă©galement trĂšs rĂ©guliĂšrement sur les rĂ©seaux pour construire petit Ă petit une communautĂ©.
Faire des petits jeux c’est aussi avoir le temps d’en faire plusieurs, et donc se donner plus de chances que l’un d’entre eux explose.
11) Pour finir, as-tu des conseils à donner aux autres développeurs pour faire la promotion de leur jeux vidéo ?
Une remarque que j’entends souvent, c’est « Moi le marketing et les rĂ©seaux sociaux, je suis nul à ça et j’aime pas ça donc je le fais pas », j’ai l’impression que pour la programmation ou le dessin, personne n’est fataliste comme ça : on est dĂ©veloppeur indĂ©pendant, on doit apprendre tout ce qu’on sait pas faire, c’est normal.
Le marketing c’est pareil, c’est normal qu’on soit nul au dĂ©but, il suffit d’en faire rĂ©guliĂšrement et comme pour tout le reste ça viendra ! C’est aussi quelque chose qui est trĂšs long et parfois douloureux Ă construire, on peut passer un an ou plus Ă poster sur les rĂ©seaux sans aucune rĂ©action mais avec de la persĂ©vĂ©rance et de la remise en question rĂ©guliĂšre je pense sĂ©rieusement que ça finit par venir.
Enfin, il y a aujourd’hui plein d’outils en ligne pour apprendre comme les newsletter How To Market A Game ou GameDiscoverCo.