En 2019, Adblock Plus était l’extension Firefox la plus utilisée en France et dans le monde. La bombe a été lâchée dans le Firefox Data Report qui révèle que « 4 des 10 principaux modules complémentaires sont des bloqueurs de publicités en France ». Il faut croire que l’allergie à la publicité en ligne serait plus tenace que le Covid19 ! De quoi donner des sueurs froides aux annonceurs, surtout quand on sait que les investissements du marché, en constante progression, ont bondi de 12% en 2019 selon le dernier bilan de l’Observatoire de l’e-pub. Pour autant, les professionnels du secteur ne devraient pas baisser les bras et, tel Neo, doivent entreprendre de mieux connaître ces internautes publiphobes de la Matrice, afin de mieux « bloquer » leurs inquiétudes. Futé non ?
Un bloqueur de publicité (AKA adblocker pour les amateurs d’anglicismes), est une extension web, une application ou un logiciel qui stoppe l’apparition de pubs sur desktop et mobile pour offrir une navigation plus fluide et plus agréable. Généralement, ces extensions cherchent et identifient les adservers d’où partent les publicités pour en masquer l’affichage sur la page web. Selon Eyeo, la société éditrice d’Ablock Plus, 40% des français adeptes d’adblocking veulent garantir la sécurité de leur vie privée sur internet. Mais la majorité (60%) ont quand même installé ces logiciels pour ne plus voir de publicités en ligne (Yougov pour Eyeo – 2019).
Portrait-robot et comportement du publiphobe digital
Premier enseignement de l’étude Eyeo : le bloqueur-type est plutôt un homme (58% des utilisateurs, contre 42% de femmes), âgé de 18 à 24 ans (38%) et CSP+. Il est hyper-réceptif à l’innovation et gros consommateur de nouveaux produits. C’est « une personne jeune, qui a fait des études, qui est technophile et qui gagne un salaire au-dessus de la moyenne ». Comment donc ne pas s’y intéresser ? Autre fait enthousiasmant, les utilisateurs d’adblockers dépensent des sommes plus importantes que ceux qui ne bloquent pas les pubs. En effet, s’ils cliquent rarement sur les publicités, ils présentent cependant un taux de conversion de 15% (contre 3% en moyenne), soit plus que les autres internautes. Cela s’expliquerait par la caractéristique principale de ces Millennials : ce sont des « game changer ». Ils veulent garder le contrôle de leur navigation et choisir les produits qui les intéressent vraiment. L’engagement est d’ailleurs un des nombreux attraits de cette population, selon Yassine Belfkih, CEO de l’agence Fabernovel Data& Media. « Le plus souvent, les internautes équipés d’adblockers accèdent directement au site de leur choix et non en cliquant sur une publicité. En revanche, le nombre de pages vues par ces utilisateurs augmente de 8,5% », précise-t-il sur le site de La Reclame. En résumé, il n’est plus envisageable d’ignorer les utilisateurs d’adblocker car :
- Ils sont jeunes, très instruits et perçoivent des salaires élevés
- Ils dépensent plus d’argent en ligne que les internautes qui ne bloquent pas les publicités
- Ils sont plus susceptibles d’acheter des produits après avoir vu une publicité en ligne
- Ils achètent davantage dans tous les secteurs du commerce de détail Une cible de choix à ne surtout pas négliger.
Une cible de choix à ne surtout pas négliger.
Du blocage au filtrage, une lueur d’espoir ?
Une question hante les nuits de tous les marketeurs aventureux : les utilisateurs d’adblockers sont-ils une audience impossible à atteindre ? Il semblerait que tout ne soit pas perdu. Des initiatives très créatives ont montré leurs preuves, comme Netflix, par exemple, qui a diffusé son annonce lors de la sortie de la série BlackMirror… uniquement aux utilisateurs d’Adblock !
Il fallait oser ! La plateforme de streaming a fait le pari d’adresser son message publicitaire aux internautes qui ne voulaient justement pas le voir. Et ce fut un gros succès ! Le penchant anti-pub que l’on observe chez cette catégorie d’internautes n’est finalement pas aussi radical qu’il n’y parait. D’abord parce que l’adblocking semble se stabiliser selon Kantar Media (voir graphique ci-dessous), mais il est aussi intéressant d’observer une nouvelle tendance qui se dessine : le filtrage publicitaire.
Si la plupart des utilisateurs français d’adblockers sont effectivement critiques vis-à-vis des publicités en ligne, de par leur caractère intrusif, ils sont 58% à souhaiter pouvoir les filtrer plutôt que de les bloquer complètement. Plus de six d’entre eux, sur dix seraient même prêts à désactiver le logiciel sur les sites capables de proposer un faible nombre de publicités. C’est maintenant aux publicitaires et aux éditeurs de jouer en proposant des formats moins envahissants et plus créatifs. En somme, séduire avec subtilité pour mieux conquérir !
#STAYSAFE
Marie Hélène SYLVA