La consommation digitale que cela soit pour la France ou au niveau mondial est devenue non seulement multi-devices mais dorénavant cross-devices. Que cela soit pour un acte d’achat ou pour le visionnage d’une série, les internautes ont désormais l’habitude de passer d’un appareil à l’autre.
Prenons l’exemple du tourisme, un téléspectateur soumis à une offre promotionnelle sur le Mexique sur sa télé, pourra tour à tour lancer une recherche sur un comparateur de vol sur son mobile, chercher des images de Cancun sur sa tablette puis faire une demande de devis sur son ordinateur. L’enjeu est donc d’identifier cet internaute comme une seule et même personne et ce, quel que soit le device. Un opérateur de voyage souhaiterait recibler d’urgence sur desktop ou tablette un mobinaute venant d’utiliser son application de comparateur de vol via son smartphone. Pourtant sans solution technique adaptée, ce prospect chaud sera confondu avec l’internaute PC lambda.
Les annonceurs ont bien compris cet enjeu et s’évertuent en interne comme lors des collaborations avec leur agence à relever le défi de l’ID utilisateur. Retracer le parcours client sur tous les appareils digitaux est une demande de plus en plus pressante et éminemment stratégique pour les marques. Cela présuppose toutefois plusieurs solutions techniques. En s’intéressant uniquement au desktop et au mobile/tablette, il faut envisager de :
-réconcilier les cookies issus des navigateurs des différents devices
-réconcilier les informations des cookies avec les informations issues d’applications, fournies par les SDK
Sans informations tierces, il n’est pas possible de lier un parcours client sur mobile, à une navigation sur desktop – impossible pour un site de lier le navigateur mobile de Pierre au cookie déposé sur son PC il y a une heure.
La première solution pour cela est l’environnement loggé. C’est un des gros avantages concurrentiels de Facebook & Google qui peuvent se passer de cette contrainte du cookie et donc de la dépendance aux informations se trouvant sur le device de l’internaute.
Cependant les plans media ne se concentrent pas encore, uniquement sur Google & Facebook. Dans cette optique d’ID utilisateur et de réconciliation cross-devices, de plus en plus d’agences se sont donc mises à proposer des DMP lors des pitchs.
La DMP, data management platform, est une base de données recueillant les données des internautes. Cette data peut-être issue de l’annonceur lui-même, d’éditeurs partenaires (il faut pouvoir demander l’autorisation d’installer des tags DMP sur le site des éditeurs) ainsi que de tiers (data providers, cookies issus des adservers). Le but de la DMP étant de passer d’une vue site-centric (lié à un nom de domaine : pages du site consultée, temps de visite…) ou ad centric, à une vue user-centric (âge, profil, centre d’intérêt) beaucoup plus lisible et pertinente pour les marques.
Google toujours précurseur dans ses positionnements sur le marché et leader lorsqu’il s’agit d’identifier de façon fiable et personnelle un internaute, a dès 2016, lancé sa DMP via la suite Google Analytics 360. Il est par exemple possible, sur tous les sites possédant des « match tag », de lier un cookie doubleclick.net (le nom de domaine de l’adserver publicitaire Google) à un user ID Google. Concrètement, l’annonceur grâce à cette DMP Google Analytics 360, bénéficiera de la donnée Google pour connaitre l’internaute exposé à sa publicité, ce qu’il n’aurait jamais pu obtenir avec le seul cookie doubleclick. (*)
De nombreux autres acteurs se sont désormais lancés dans des solutions de DMP, le but étant toujours de rattacher des cookies, quel que soit le device, à un identifiant unique. Pour se faire on utilise la moindre information déclarée par l’internaute, cela peut-être un login rentré, un formulaire rempli ou bien encore une arrivée sur site via une newsletter.
Une fois ces données réconciliées, on peut commencer à reconstituer des débuts de parcours cross-devices et à en déduire des parcours client types. Il est dès lors possible de créer de nouveaux segments, de mettre en place des stratégies de look-alike ou de travailler sur du retargeting de façon beaucoup plus fine qu’avec les seuls cookies d’adservers.
Si les DMPs ont subi de plein fouet la mise en place de la règlementation RGPD et que leur implémentation reste fastidieuse et complexe (notamment d’un point de vue contractuel avec les éditeurs), il y a fort à parier qu’elles seront de plus en plus intégrées aux campagnes des annonceurs, en partie car elles apportent une réponse à une problématique majeure des marques : identifier et cibler correctement un internaute quel que soit l’appareil utilisé.
(*) Cookie Matching – Google : https://developers.google.com/authorized-buyers/rtb/cookie-guide