
On pourrait croire qu’à l’ère de l’algorithme-roi, la notoriété se mérite à coup de valeurs, d’idées et d’expertise.
Spoiler alert : pas toujours. Dans ce monde qui scroll plus vite qu’il ne pense, la polémique s’est hissée au rang d’arme de séduction massive. Elle explose les vues, fait grimper les abonnés, et provoque des débats aussi passionnés que stériles. Mais derrière chaque bad buzz bien orchestré, se cache une ligne rouge. Et parfois, cette ligne est piétinée comme un vulgaire fil de coton.
Et si choquer, c’était le nouveau “bonjour” ? On a tous déjà vu ça. Un tweet bien piquant. Une pub qui frôle le malsain. Une vidéo TikTok qui déclenche des tempêtes dans les commentaires. Et dans l’ombre, une marque ou une personnalité qui sourit en comptant les vues.
Parce qu’au fond, dans l’économie du clic, l’émotion prime. Pas besoin que ce soit utile, juste que ce soit clivant. “Fais réagir, et tu règnes”, murmurent les Community Managers fatigué.
Mais soyons honnêtes : ce scénario ne date pas de TikTok. Flashback dans les années 90.

Madonna, ou l’art de scandaliser avec panache
Impossible de parler de polémique sans évoquer Madonna, la Reine incontestée du « je choque donc je suis ». Elle a dansé en lingerie sur des crucifix, embrassé Britney en direct aux MTV Awards, posé avec une croix renversée, et défié les dictats de la bienséance religieuse, sexuelle et politique.
Mais à la différence d’un bad buzz TikTok mal calibré, Madonna maîtrise l’art du scandale comme une cheffe d’orchestre. Chaque controverse racontait quelque chose : sur les femmes, sur les corps, sur la liberté. Elle n’a jamais provoqué pour provoquer. Elle a provoqué pour déranger, faire parler, et surtout, faire avancer.
Benetton : le précurseur du clash chic
À la même période, lorsque le politiquement correct était encore bien ancré dans les esprits, Benetton débarque et balance tout : un homme séropositif mourant dans les bras de sa mère, un prêtre et une nonne qui s’embrassent, un bébé encore relié par le cordon ombilical. Est-ce que c’était de la mode ? Non. Est-ce que c’était de la pub ? À peine. Est-ce que c’était du génie ? Clairement.

Benetton n’a jamais vendu un pull en cachemire aussi fort qu’avec une image choc. Ils ont compris avant tout le monde que provoquer, c’était marquer. Que le malaise fait vendre autant que le glamour. Et devine quoi ? Ça a marché. Jusqu’à ce que le message se perde, que la provocation ne sache plus quoi dire, et que le public dise stop.
Dans une époque où l’on confond trop souvent visibilité et crédibilité, le vrai pouvoir réside dans l’alignement. Si la provocation est en cohérence avec ce que le branding de marque, ce qu’elle défend, alors son sa popularité peut accroitre. Sinon ? elle devient juste un feu de paille de plus dans le cimetière numérique.
Toute stratégie polémique doit être pensée dans une logique d’ensemble : pourquoi provoquer ? Dans quel contexte ? À quelle fin ? Une polémique qui vient renforcer les valeurs d’une marque ou d’un engagement personnel peut être perçue comme courageuse. Mais une polémique opportuniste ou contradictoire avec l’image initiale sera perçue comme manipulatrice.