Image illustrant la mode de seconde main- @Pexel
Ce billet vient clore une série d’articles sur l’essor de la seconde main et sa profonde transformation depuis l’avènement du numérique. Nous avons exploré l’apport du digital au marché de la seconde main entre l’émergence des plateformes spécialisées et leur promesse de transparence sur la qualité des produits. Dans notre dernier article, nous opposions la mode de seconde main à la « fast fashion » en nous intéressant à la redoutable stratégie digitale de Shein. Le géant de la « fast fashion » a su tirer profit des nouvelles technologies et de l’exploitation de la DATA pour anticiper et s’adapter aux tendances du marché. Elle a également développé une imparable stratégie digitale en actionnant des leviers comme la micro-influence sur les réseaux sociaux avec ses incontournables « Haul » qui pullulent sur la toile. Son attractif programme de fidélisation « pull » attire de nouveaux clients et c’est aussi pour la marque un moyen de poursuivre et d’entretenir sa relation client à distance. Sans oublier l’expérience client « Shein » qui est pensée pour être fluide et intuitive grâce à la facilité d’utilisation de son site web et de son application, ce qui la hisse au rang de marque « top of mind » derrière Temu.
1- Fast-fashion…Que dit la nouvelle loi pour les marques ?
Depuis la parution de notre dernier article, la loi de « régulation de la fast fashion » est venu encadrer ce business model. Son objectif est dans un premier temps de définir et de distinguer ce qu’est une entreprise, marque ou interface commerciale de « fast-fashion », afin de poser un cadre légal à ce système. Les différentes mesures de cette loi ont pour but de radicalement transformer le processus de production de ces entreprises et de les rendre plus respectueuses des droits de l’homme et de l’environnement. Avec notamment, la mise en place d’un bonus-malus pour les entreprises les plus polluantes, un renforcement des contrôles des produits utilisés tout au long de la chaîne de fabrication afin de préserver la santé des petites mains de cette industrie. Ainsi que la présence systématique d’un éco-score sur l’étiquette de chaque article qui indiquera au consommateur l’impact environnemental du produit tout au long de son cycle de vie. Cet indicateur informe le consommateur sur la composition du produit, si les matières premières sont dites « matières privilégiées » à faible impact sur le climat, recyclées, organiques, issues de la culture biologique ou raisonnée. Mais aussi si le processus de fabrication est énergivore ou s’il a généré la production de déchets. Pour finir l’éco-score renseignera sur la durabilité et l’indice de réparabilité du produit afin de prolonger sa durée de vie. Les entreprises de « fast-fashion » devront respecter ces exigences qui seront pour certaines applicables à compter de 2025.
Le saviez-vous ?
L’industrie textile figure parmi les plus écocides au monde, elle génère à elle seule 10% des émissions de gaz à effet de serre et pourrait atteindre d’ici 2050 = 26% d’émissions de GES. Pour illustrer l’ampleur de son impact, nous allons prendre pour exemple un composant crucial à la chaîne de production textile qui est aussi l’une des ressources les plus précieuses de la planète : l’eau.
Imaginez-vous que la fabrication d’un simple T-shirt requiert en eau, l’équivalent de 70 douches et 285 pour celle d’un jean. C’est vous dire l’impact dévastateur de la fast-fashion sur la société et l’environnement avec son rythme effréné de production, sa consommation excessive et ses conséquences…qui annonce un épuisement accéléré des ressources naturelles.
Que dit la loi…d’un point de vue du consommateur ?
Parallèlement à la régulation de l’industrie, l’autre volet important de cette loi vise à accompagner le changement de comportement des consommateurs pour une consommation plus éclairée et responsable. Les entreprises de « fast-fashion » auront l’obligation d’afficher sur leurs sites web et applications des messages visant à sensibiliser les consommateurs sur l’impact environnemental de leurs produits. Ils devront aussi communiquer sur les moyens de prolonger la durée de vie des produits comme le réemploi, le recyclage ou encore la réparation. Les pouvoirs publics attendent également de ces entreprises qu’elles sensibilisent et encouragent à la sobriété pour une consommation raisonnée et juste
La mesure phare de cette loi (Article 3- Régulation de la fast-fashion) est l’interdiction de toute publicité ou promotion d’entreprises ou de produits issus de la « fast-fashion ». Ce qui remet considérablement en question la stratégie de ces entreprises qui ont fait du digital un puissant levier de croissance.
Focus sur les opportunités qu’offrent le contexte actuel de l’industrie textile à la mode de seconde main. Quelles perspectives et stratégies digitales devront adopter les acteurs du secteur face à ces évolutions de marché ?
2-Fast-fashion : clap de fin pour la pub off et on line !
Dans un contexte de déconsommation textile fort par choix, par contrainte (inflation) ou due aux perturbations du marché avec la disparition de nombreuses enseignes de mode « Premium ». L’article 3 de la loi-« Régulation de la fast-fashion » s’inscrit d’une part dans une logique de protection du consommateur en lui redonnant le pouvoir de choisir librement ces marques coup de cœur. Mais aussi d’une certaine manière de le libérer du diktat de cette publicité jugée trop intrusive et agressive. En effet, en les privant de visibilité ces marques de fast-fashion seront moins présentes sur nos écrans de smartphones, dans les fils d’actualité de nos réseaux sociaux et par conséquent dans nos esprits de consommateurs.
Concrètement…limiter la visibilité de ces marques c’est :
- Réduire l’exposition des consommateurs aux messages incitant à des achats compulsifs et non responsables (#lutter contre la surconsommation textile)
- Eviter de banaliser les pratiques de la fast-fashion et de les présenter comme des modèles de consommation désirables (#lutter contre l’obsolescence programmée)
- Redonner du pouvoir aux consommateurs en leur permettant de faire des choix éclairés et responsables (#consommation durable)
Cette nouvelle donne pourrait marquer un tournant décisif dans l’industrie textile et faire de la mode de seconde main « un standard » en matière de consommation essentiellement axé sur la qualité et la durabilité des articles. Cela peut être aussi un moyen de promouvoir les marques engagées dans une production durable et responsable. La réduction de l’impact publicitaire des marques de fast-fashion pourrait aussi encourager les consommateurs à explorer davantage d’autres sources d’inspiration, telles que les créateurs indépendants, le vintage, le Do It Yourself (DIY)ou encore l’upcycling.
3-L’alchimie parfaite du digital et de la mode de seconde main !
3.1- Seconde main : un marché en forte croissance
Le marché s’est libéralisé avec l’émergence d’une nouvelle concurrence avec les plateformes spécialisées comme Vinted ou Leboncoin qui ont rendu le marché plus accessible et concurrentiel. Les marketplaces des réseaux sociaux Facebook et Instagram ont également joué un rôle important dans cet essor en créant par la même occasion des communautés engagées autour de la mode de seconde main.
– Perspectives pour les boutiques physiques de mode de seconde main…
La plupart des acteurs historiques de la mode d’occasion ont amorcé le tournant de la transformation digitale et disposent aujourd’hui d’un site E-commerce. Pour accompagner une stratégie de présence numérique efficace, il est nécessaire de créer une identité et image de marque forte et engagée. La marque peut soit ainsi véhiculer de manière authentique ses valeurs, démontrer son expertise (sourcing, qualité des produits, …). Elle peut également communiquer en toute transparence sur ses engagements et actions RSE. Ces éléments permettront de renforcer la notoriété de la marque et de s’imposer un peu plus un marché devenu très concurrentiel. Pour cela, il est tout aussi important de proposer un contenu inspirant, de qualité, avec des visuels authentiques et pertinents. La marque devra également adopter un ton proche de ses consommateurs lorsqu’elle communique avec elle.
Comment le marketing organique peut booster le site e-commerce d’une marque de seconde main ?
Stratégie à faible coût voire gratuite: l’un des leviers du marketing organique est le référencement naturel-SEO, il permet de figurer dans les meilleurs résultats des moteurs = Visibilité + Générer du trafic . Pour optimiser son SEO, il est important de produire un contenu (textes, images, architecture du site, vitesse de chargement des pages, back links,…) de qualité. Les autres leviers sont les réseaux sociaux et l’email marketing (nous y reviendrons un peu plus bas dans cet article).
Stratégie à budget: le référencement payant SEA permet de choisir des mots clés pertinents en lien avec notre activité et nos produits et de renforcer son positionnement dans le top des résultats de moteur de recherche = Générer du trafic qualifié, augmentation du taux de conversion et de très « potentielles » ventes grâce à des campagnes publicitaires hyper ciblées et ajustables grâce au suivi en temps réel via Google Ads. Pour aller encore plus loin, ces marques pourront segmenter encore plus leur audience et donner beaucoup plus de visibilité à leurs articles et générer des ventes via Google Shopping.
3.2- Une évolution de l’offre et un changement de comportement des consommateur :
Le digital a permis de proposer une offre de mode d’occasion diversifiée allant des pièces vintages ou uniques aux dernières tendances mode à des prix très attractifs. Ce changement de paradigme a notamment permis de supprimer les frontières géographiques et de chiner en quelques clics des pièces rares « quasiment » dans le monde entier.
Entre prise de conscience écologique et baisse du pouvoir d’achat, les habitudes de consommation ont nettement changé . Le digital a largement participé à la démystification de l’achat de vêtements d’occasion, en le rendant plus tendance et désirable. Le digital a favorisé la consommation responsable et permis de mettre en lumière les avantages de l’économie circulaire. Et notamment comment la mode de seconde main est la solution dans un contexte socio-économico-environnemental urgent.
3.- L’innovation pour une expérience utilisateur fluide et mémorable :
Les acteurs de la mode d’occasion en ligne mettent tout en œuvre pour proposer une expérience client fluide et intuitive . Pour cela, ils misent sur la transparence avec par exemples des fiches claires et complète, élément indispensable pour faciliter la prise de décision d’achat et convertir en un clic l’internaute. Pour rendre la navigation la plus agréable possible, des moteurs de recherche sont intégrés et des filtres très performants permettent selon des critères bien précis (taille, la marque, couleur…) de trouver l’article souhaité.
Perspectives pour les acteurs de la mode de seconde main pure player, boutique physique et phygital :
Un site E-commerce est indispensable pour les acteurs de la mode d’occasion et même pour les boutiques physiques. Ce qui leur permettraient de développer une stratégie phygitale qualitative et au prospect de par exemple débuter son parcours client en ligne et de la finaliser en magasin (click and collect) et inversement. Il est important de proposer un site fiable et hautement sécurisé pour les paiements en ligne et une politique de retours simple et rapide pour rassurer le client. Pour réduire encore plus son emprune Les marques devront mettre en place une logistique optimisée en proposant des envois groupés, utiliser des emballages recyclables ou issus de matériaux recyclésun service client de qualité, attentionné et très réactif. Pour attirer de nouveaux clients et conserver ceux déjà conquis, il est important de développer un programme de fidélisation qui récompense les comportements durables(réparation, recyclage, achat d’occasion, …) des clients.
3.5. Communautés engagée et influence, fédérer pour gagner l’adhésion !
Les réseaux sociaux ont favorisé l’émergence de communautés autour de la mode de seconde main, où les utilisateurs peuvent échanger des conseils, des astuces et des inspirations entre consommateurs engagés. La marque devra faire du content marketing son allié de taille et proposer des contenus digitaux, inspirants et pédagogiques de qualité pour engager et fédérer encore plus sa communauté. Ce panel sera d’une part une source fiable d’informations et sera prescriptrice pour tous ceux qui sont dans la phase de découverte de la marque et de ses produits.
Le marketing d’influence personnalisé est là aussi un puissant outil de communication-marketing pour ces marques qui devront collaborer avec des influenceurs engagés et qui partagent surtout les mêmes valeurs. Ces collaborations commerciales (posts, lives,…)permettront de communiquer autour de la marque et de ses articles. La mise en place de programme d’affiliation avec ces influenceurs permettra de toucher une nouvelle cible et de fidéliser encore plus les clients.
Perspectives pour les acteurs de la mode de seconde main :
Pour ces marques de mode d’occasion, il est intéressant de nouer des partenariats avec des marques durables, des plateformes spécialisées et marketplaces afin de proposer des collections capsules, des événements virtuel ou physique co-brandés ou encore des programmes de reprise d’articles et accessoires de mode. Pour soutenir davantage l’économie circulaire, ces marques peuvent mener un travail conjoint avec des associations œuvrant pour la protection de l’environnement et la lutte contre la précarité.
Faire la différence…!
Les marques devront également miser sur un élément de différenciation fort pour se démarquer et s’imposer encore plus sur ce marché. A l’image de la marque Cent-Neuf qui dispose d’un bureau de style qui crée des collections en fonction des tendances mode du moment et qui propose en plus un service gratuit de conseil en image assuré par le DA de la marque.
En définitive…
Grâce au digital, la mode de seconde main a connu un essor fulgurant séduisant une nouvelle génération de consommateurs soucieux de leur impact environnemental. En misant sur une stratégie digitale solide, les acteurs du secteur pourront non seulement accroître leur visibilité et leur chiffre d’affaires, mais aussi accélérer la transition vers une mode circulaire et durable. L’exploitation de la DATA leur permettra de sonder et de lancer les tendances mode en temps réel, cela peut être un très bon outil de monitoring pour concevoir leurs collections et faire rencontrer une offre pertinente et une demande désirable. Une communication transparente, valorisant les certifications écologiques et mettant en avant les bénéfices environnementaux de la seconde main est essentielle. De plus, la personnalisation de l’expérience client grâce aux algorithmes et aux outils immersifs comme la réalité augmentée participent au renforcement de l’engagement clients. Pour ancrer durablement cette démarche, il est primordial de combiner ces initiatives digitales avec des actions de sensibilisation de terrain, avec de l’affichage publicitaire et numérique dans des points de connexion comme les mairies, les gares ou les cinémas. La conception et la tenue d’ateliers créatifs et de rencontres thématiques tout public en partenariat avec les associations locales auprès des écoles, des entreprises et des collectivités locales permettront de développer des projets innovants et surtout de toucher un public parfois éloigné du numérique.
La parfaite alliance du digital et de l’humain nous assurera une transition réussie vers une mode durable, juste et équitable.
Et si nous adoptions ensemble une garde robe éthique et responsable ?
SOURCES
Fashion Network
Alterna-énergie
Vie publique