Introduction
Bien que le luxe base son business modèle sur une clientèle d’élite et restreinte, cette industrie a toujours su fasciner le reste de la population à travers des campagnes medias très efficace. L’un des moyens dont le luxe a fréquemment eu recours pour gagner en notoriété, en image de marque et en top of mind s’est fait via les médias mainstream. Ces campagnes, parfois non officielles (dans le sens où la marque n’a pas eu recours au placement de produit), restent un vecteur de communication très fort.
Quels sont ces médias, très exposés à la population, où les marques de luxe ont réussi le tour de force de s’imposer et marquer les esprits ?
LE 7ème ART
Il est évident que le cinéma est un média de communication efficace lorsqu’il s’agit de marquer une population. Les chiffres d’affaires réalisés par les blockbusters hollywoodiens en sont témoins. Cette industrie, et plus particulièrement Hollywood, a toujours su fasciner le monde entier et sème souvent des messages subliminaux à travers leurs œuvres. En effet, le fief américain du cinéma a souvent porté un but politique dissimulé afin d’orienter l’opinion des masses (on parle de soft power à l’américaine). Cet art de présenter une vision de la réalité, bien souvent manichéenne et simpliste (Les US sont les gentils, les russes sont les méchants) a longtemps permis à certaine marque de s’imposer comme symbole de réussite. On peut citer James Bond, l’agent secret charismatique, beau garçon, séducteur et à qui tout réussi, qui pilote des véhicules qui ont fais fantasmer les masses.
Aston Martin, qui comptabilisait un chiffre d’affaire de 282 millions de livre en 2018, a bénéficié pendant des années de l’aura de ce personnage emblématique du cinéma, ce qui a certainement dû booster les ventes du constructeur automobile chez la clientèle fan du personnage.
l’acteur Daniel Craig, jouant James Bond au cinéma depuis 2005 dans un spot publicitaire pour Aston martin
Dans un autre genre, encore bien plus marqué, un film comme le diable s’habille en Prada, a énormément aider la marque à gagner en top of mind. Le film a eu un impact populaire énorme, et toute les marques de mode de luxe s’étant laissé prêter au jeu d’apparaître à l’écran, ont marqué toute une génération d’acheteurs/ses et de futurs acheteurs/acheteuse. En 2016, pour fêter le dixième anniversaire de la sortie du film, Vanity Fair fit une liste des résultats du box-office pendant le week-end du Jour de l’indépendance aux États-Unis sur les quinze dernières années. Le diable s’habille en Prada arrivera 2nd derrière Superman Returns.
Le luxe apprécie particulièrement le rapprochement avec le cinéma et ses acteurs, adorés par le grand public. Les marques ont souvent recours à eux pour leurs spots officiels, afin de resserrer le lien avec les spectateurs des grosses franchises cinématographiques, on peut citer Johnny Depp pour Dior tandis que Chanel s’offre Brad Pitt et Lancôme : Julia Roberts.
En plus de subtiliser les stars des blockbusters, thrillers ou film romantiques hollywoodiens, le luxe emprunte également d’autres codes au cinéma. Le réalisateur David Lynch, connu entre autres pour Mulholland Drive, a réalisé des publicités commerciales pour Chanel, Christian Louboutin ou encore Gucci.
Le nombre de placement de produit classique dans le cinéma est incalculable, on citera quand même le film Transformers 3 qui, selon le site Brandchannel du groupe Interbrand (Omnicom), ne comporte pas moins de 71 placements visibles à l’écran Armani, Beats, Budweiser, Cadillac, Chevrolet, Coca-Cola, Goodyear, Gucci, Nike, Red Bull…
LES CLIPS MUSICAUX
Bien que leur impact culturel soit moins forts que ceux du cinéma, les clips restent un excellent vecteur de communication pour les marques. En matière de musique, le luxe bénéficie également de beaucoup de publicités gratuites, pour des vidéos comptabilisant des millions de vues.
Les clips de hip hop et de R’n’B font très souvent l’éloge de marque de luxe, certains titres mentionnent même une marque dans le nom de la musique. Un des hits de Drake s’appelle Aston Martin music, Miley Cyrus fait la promotion de sneakers Jordan hyper branchées et couteuse, Kanye West chantait les mérites du chardonnay dans son clip Marvin Gaye and Chardonnay, tandis que chez nous Maitre Gims mentionnais dans son hit de 2015, Sapés comme jamais, Balmain, Louboutin, Chanel, Ferrari, Zanotti, Louis Vuitton etc… Ces publicités, pas demandées par les marques, permettent au prospect de visualiser les produits dans un environnement moins commercial, et ainsi de se les « approprier » plus facilement. Cependant, elles souffrent parfois d’une stigmatisation et courent le risque de devenir plus « cheap » car très vanté par les nouveaux riches.
Les marques de luxe, qui ont longtemps voulu s’éloigner des codes de ces clips de rap, ont aujourd’hui totalement embrassé cette proximité devenue impossible à ignorer. La musique urbaine étant devenue le genre musical le plus populaire en France et dans le monde entier, en atteste les chiffres de ventes de la SNEP sur l’année 2018 (Johnny Halliday – Mon Pays C’est l’Amour (≈ 1,4 million d’albums ; Maître Gims – Ceinture Noire (≈ 612.000 albums) ; Djadju – Gentleman 2.0 (≈ 444.000 albums ; Orelsan – La fête est finie (≈ 324.000 albums) ; Damso – Lithopédion (≈ 261.000 albums), on y retrouve 4 personnalités issus de ce genre dans le top 5, de quoi cibler l’audience de ces artistes.
Depuis, l’industrie textile du luxe a énormément emprunté au streetwear. Les plus grands créateurs se sont mis à la production de jogging ressemblant à ceux portés par les rappeurs, de sneakers imitant celles de leurs sportifs préférés… De plus, les nouveaux créateurs, issu également de la génération Y, ne cache plus leur amour pour cette musique et s’affiche fièrement auprès de ces idoles du rap. Olivier Rousteing, de la maison Balmain, a souvent été vu avec Kanye West tandis que Virgil Abloh de Louis Vuitton parade auprès des chanteurs de PNL.
Virgil Abloh et les chanteurs de PNL au défilé Off-White à Paris
La moyenne d’âge des auditeurs de rap étant assez jeune, l’apologie de ces enseignes de luxe par les artistes leur permet de toujours rester branchées, jeune, fraîche et convoité. Ainsi, ces maisons parfois centenaires, conserve cette image de symbôle de réussite auprès des jeunes car vanté par leurs rappeurs préférés. Ce name dropping constant de marque de luxe leur permet de s’éloigner de la ringardise habituelle que les jeunes réservent aux marques milieux de gamme anciennes, qui elles, deviennent souvent obsolète après quelques brèves années de gloire (Airness, Sergio Tacchini, Scott, Sean John, Redskins etc…)
Conclusion
Que ce soit le cinéma, la musique, ou même le sport, le luxe inonde ces médias mainstream à travers des placements subliminaux ou parfois totalement assumé. L’industrie sait parfaitement jouer avec les codes de ces médias et surfer sur la vague de la popularité continuellement. L’audience que représente ces médias, est très sensible au message des marques car elle s’est déjà approprié les personnages vantant l’enseigne. Il est désormais impossible d’imaginer l’absence de ces marques au cinéma ou dans des clips musicaux, cependant, il est parfois difficile pour elles de rester maitresse de leur image à travers ces médias. Le rap et Hollywood, n’ont pas fini de faire les beaux jours du luxe dans le monde entier.