À l’heure où les pratiques culturelles subissent une numérisation prédominante, persuader le spectateur de troquer le confort de son canapé contre l’expérience physique d’un spectacle vivant devient un défi stratégique majeur. Cette problématique se situe à l’intersection de deux mondes en apparence contradictoires : le virtuel et le réel, le numérique et la scène. La conception d’un itinéraire numérique se présente comme une solution méthodique, une cartographie élaborée avec précision visant à transformer l’indécision en un parcours clair et attrayant. Cet itinéraire, bien loin d’une simple trajectoire linéaire, se compose d’étapes réfléchies, incitant le spectateur à franchir les portes virtuelles pour accéder à la scène réelle. À cet égard, une solution marketing s’impose : faciliter l’accès, dégager le chemin, en somme, éclairer le sentier pour guider le spectateur de son canapé à la scène.
Réaffirmer la primauté du physique dans un paysage culturel numérique
Ainsi, une réévaluation de nos approches devient impérative pour présenter les arts du spectacle vivant comme intrinsèquement liés à un lieu physique, une demeure collective, et un espace communautaire. La mise en place d’itinéraires numériques émerge comme un levier essentiel pour orienter les publics vers une destination, renforçant simultanément la pertinence et l’attrait des expériences physiques. Ces passerelles numériques, bien au-delà de leur simple fonction de guide, établissent des liens concrets entre le virtuel et le réel. Leur objectif est de susciter un désir palpable de redécouvrir le lieu physique, transcendant ainsi les limites de l’écran pour une immersion (je l’espère) mémorable.
Naviguer à l’ère du Swipe : Face à l’indécision, l’itinéraire comme remède
Aujourd’hui, chaque glissement de doigt dévoile une multitude d’options, faisant de l’indécision le mal contemporain du consommateur. Avouons-le, c’est ultra-méga-long de choisir son programme sur Netflix. En marketing, la création d’un itinéraire vise à transformer cette indécision en une expérience de choix guidée, offrant à l’utilisateur une direction claire au sein de la profusion des possibilités. La structure culturelle, la programmation et les valeurs, les artistes et les publics, sans oublier le lieu lui-même : le spectateur casanier doit sentir que chaque étape le rapproche un peu plus de l’expérience physique du spectacle vivant. L’itinéraire devient une séquence d’engagements soigneusement orchestrée, une série d’invitations séduisantes pour parer au recul dû à cette interrogation cruciale : flemme, ça en vaut vraiment le coup ?
La zone de confort rassure : le pouvoir des souvenirs anticipés
Dans cette optique, notre approche vise à atténuer ces résistances, à dissiper les doutes liés à une expérience inconnue, tout en mettant en lumière la valeur concrète de chaque sortie. La clé réside dans la création de l’illusion d’avoir déjà franchi les portes du théâtre. L’utilisation de contenus visuels répétés, de simulations virtuelles et de récits immersifs n’a pas pour seul objectif de susciter de simples illusions mémorielles, mais plutôt d’ancrer subtilement et à répétition (encore), le désir de vivre ou de revivre fictivement cette expérience. En cultivant des souvenirs anticipés, qu’ils proviennent d’autres spectateurs ou d’un récit fonctionnel, nous stimulons le désir de vivre ou de revivre cette expérience. N’est-ce pas semblable à notre propension à rester sur Netflix pour regarder Friends en boucle, malgré l’immense catalogue? La zone de confort, rassurante, joue ici un rôle prépondérant.
Briser le mythe du marketing-sans-âme : l’heure de la réconciliation
La remise en question fondamentale réside dans la déconstruction du mythe ancestral qui opposerait le spectacle vivant au numérique, le canapé à la scène, le réel au fictionnel. Bien loin d’évoluer dans un monde segmenté par des dualités rigides, ces concepts entrent en collision, s’entremêlent et se heurtent en permanence. L’enjeu majeur consiste à explorer la question du langage pour comprendre que le marketing digital et le monde du spectacle vivant ne sont pas antagonistes, mais plutôt interconnectés. Dans cette perspective, le langage prend la forme d’un itinéraire d’accès, parfois même d’une médiation numérique. En marketing digital, cela se traduit par une boîte à outils adaptable omnicanal et modulable, devenant un impératif de modernisation et d’évolution du spectacle vivant.
3ème étape : CRÉER L’ITINÉRAIRE
Cet article est le troisième d’une série visant à partager un mode d’emploi, un guide ou un recueil réconfortant pour tenter de comprendre les nouvelles pratiques culturelles des spectateurs et de définir quelles sont les stratégies webmarketing à mettre en place pour les amener à passer du canapé à la scène. Merci pour votre attention, c’est reparti, let’s go.
Cartographier le parcours client : maillon essentiel de l’itinéraire
Le parcours client, fondamental pour l’expérience spectateur, représente le cheminement incontournable de la sensibilisation à la fidélisation. Structuré en étapes telles que la prise de conscience, l’évaluation, l’achat et la fidélisation, ce parcours exploite divers points de contact, numériques, sociaux ou physiques. Dans un article, Qualtrics la définit comme « une représentation visuelle du chemin suivi par un client pour mener une tâche à bien. Ce mapping visuel vise à identifier toutes les interactions possibles entre un consommateur et une entreprise pour réaliser une action spécifique« . Cette approche permet aux entreprises de définir les points d’ancrages, d’arrêts ou de relances, ainsi que les canaux associés à ces points de contacts. En somme, une méthode pratique pour personnaliser les expériences, optimiser le parcours, atteindre une satisfaction client accrue et une fidélisation réussie.
· À savoir : les limites du mapping excessivement codifié
Ahir Gopaldas et Anton Siebert, dans un article du Harvard Business Review, remettent en question la méthodologie traditionnelle du parcours client qui pourrait négliger la variété des préférences clients. “Si certains parcours ne demandent que peu d’efforts (regarder des films sur Netflix ou commander à nouveau le même repas sur l’application mobile Seamless), d’autres exigent un effort mental ou physique considérable (apprendre une nouvelle langue sur Duolingo ou faire de l’exercice sur un vélo Peloton)”. Aussi, ils établissent leur propre Matrice du Parcours Client définit en quatre archétypes : une routine facile et prévisible ; une virée facile mais imprévisible ; un trek qui demande des efforts mais qui est prévisible ; une odyssée qui exige beaucoup d’efforts et qui est imprévisible. Cette diversité d’expériences semble souligner la nécessité de comprendre et d’apprécier la complexité des différents itinéraires clients.
Le phygital : redéfinir l’expérience client à l’ère de la convergence
Le terme phygital en marketing est une contraction de deux mots : « physique » et « digital ». Il désigne une approche qui intègre de manière synergique les canaux physiques (ou traditionnels) et les canaux numériques pour offrir une expérience utilisateur globale et cohérente. Dans un article de Thunderstone, Alice Touraine définit l’offre omnicanale comme une pierre angulaire de cette nouvelle approche, visant à offrir une expérience fluide et cohérente sur tous les canaux. “Avec Uber on ne lève plus la main pour commander son taxi mais on le commande sur son smartphone. Avec Airbnb, on ne passe plus par des chambres d’hôtes mais par cette plateforme digitale pour louer un appartement ou une maison.” Ainsi, le phygital cherche à exploiter les avantages des deux mondes pour renforcer l’engagement et la satisfaction des clients en créant des passerelles entre physique et numérique.
· Exemple : Du canapé à la scène, valorisation des stratégies omnicanal
Dans le domaine du spectacle vivant, l’approche omnicanale va au-delà de la simple coexistence de ces deux mondes. Dans son article sur Orcène, Marie Haerrig préconise une fusion synergique entre l’univers virtuel et réel : “le moment est venu d’engager une réflexion approfondie sur l’articulation, la complémentarité et le caractère substituable des offres culturelles en ligne et in situ”. Elle recommande l’utilisation du marketing phygital pour orchestrer cette fusion et donne l’exemple du spectacle expérimental Jeanne Dark de Marion Siéfert. À la lisière entre le multicanal et l’omnicanal, cette pièce se déroule simultanément en salle et en live sur Instagram. Les deux expériences, intégrées mais distinctes, incitent les spectateurs à assister au spectacle en personne et à le visionner en ligne, renforçant ainsi son succès grâce à un mariage réussi entre propos artistique et adaptation aux usages modernes.
Mimétisme en ligne : Emporté par la foule
Dans la quête pour convaincre les spectateurs de troquer leur canapé pour l’expérience vivifiante de la scène, le mimétisme se révèle être une stratégie puissante. Dans un article de Culture Data, Yoann Bonnet énonce que « Si le bouche-à-oreille est considéré comme le plus vieux média du monde, l’une de ses formes les plus évoluées en matière de stratégie marketing est sans conteste le système de parrainage. » En capitalisant sur des expériences réussies, des témoignages positifs et des succès passés, ce mimétisme façonne un itinéraire numérique guidé par les spectateurs eux-mêmes. Reconnaître ces points d’impulsions et de conversions organiques permet de favoriser la mise en avant d’un dialogue numérique (libéré de votre regard et de votre autorité). Cela favorise l’engagement, la participation du public et la création d’ambassadeurs autonomes.
· Exemple : la puissance du parrainage
Yoann Bonnet ajoute : « À l’heure où l’influence de la publicité traditionnelle semble clairement avoir atteint ses limites auprès des consommateurs, la plupart des enseignes, tous secteurs confondus, continue de développer ce type de prospection résolument participative ». Le parrainage peut encourager vos clients existants (parrains) à recommander votre programmation ou vos services à leur entourage (filleuls), en échange d’avantages ou de récompenses. D’après une étude Nielsen, 92% des consommateurs privilégient les recommandations de leurs proches, avant tout autre canal marketing. Cette pratique capitalise sur l’influence personnelle des clients pour étendre la portée de la marque. En mettant en place des incitations attractives, le parrainage crée une chaîne d’influence positive, favorisant la fidélisation des clients existants et l’acquisition de nouveaux.
Analyse de l’affiliation comme pilier stratégique
Le marketing d’affiliation est une stratégie marketing digitale impliquant trois acteurs clés – l’annonceur, la plateforme et l’affilié. Elle vise à exploiter les outils et le public d’une personne ou d’une entreprise pour attirer et convertir des clients. En échange de leur rôle dans la promotion de la marque, les affiliés sont rémunérés par le biais de commissions, créant ainsi une opportunité pour l’entreprise d’élargir son audience cible. Les programmes d’affiliation varient en fonction de la méthode de rémunération de l’affilié, focalisée sur la performance. Le coût par achat (CPA) récompense les conversions directes en ventes, tandis que le coût par lead (CPL) concerne les prospects qualifiés, généralement obtenus via des formulaires. Enfin, le coût par fan/follower récompense la génération de trafic, particulièrement efficace lorsqu’il s’agit d’impliquer des influenceurs, en fonction du nombre d’internautes recrutés. Pour plus d’informations → Guide pratique du marketing d’affiliation par HubSpot.
· Exemple : Les influenceurs comme guides de l’itinéraire à suivre
Professeur de théâtre et créatrice de contenu, Marie a brillamment édifié une communauté interactive sur son compte instagram en partageant des contenus exclusifs comme des critiques, des réactions et des retours d’expérience théâtrale. Cette approche lui a permis d’établir une connexion émotionnelle avec ses abonnés et une relation d’expertise avec les acteurs du secteur culturel. En résumé, elle a trouvé un équilibre incitant les spectateurs à suivre avec confiance les destinations qu’elle propose. Pour le secteur culturel, l’influenceur est ainsi un affilié efficace, un guide fiable, une passerelle unique facilitant la transition du spectateur du canapé à la scène. En l’impliquant dans ce rôle, vous pouvez significativement étendre la portée de votre audience et les récompenser en fonction de leur engagement. En somme, une situation gagnant-gagnant. Une fois les spectateurs dans le lieu, il ne reste plus qu’à les fidéliser (mais ça, c’est le sujet du prochain article).
Rédigé par Sarah Tcheir
Promotion 32 – Média Institute
Apprentie en communication
et relations avec les publics dans une Scène Nationale
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Pour connaître les précédents articles du guide « Du canapé à la scène » :
→ Devenir cool : se faire connaître des publics !
→ Devenir potes : Comment mieux connaître les publics ?
→ Maintenant que t’es là, reste ici