Si le Pink Washing ou le Rainbow Wahsing ont encore de beaux jours devant eux , force est de constater que certaines marques essayent de faire de l’inclusivité digitale. Grâce aux réseaux sociaux notamment où la publicité s’inscrit parfaitement dans un feed en visant directement son public. Contrairement à une affiche dans le métro, il est possible de rencontrer son public sur Tik Tok ou sur Instagram. La data recueille des informations sur les utilisateur·ices. Précisent un peu plus la niche, et les marques peuvent ainsi penser à une stratégie de contenus. Néanmoins, même si les choses évoluent, certaines personnes sont rarement représentées dans le digital. Par exemple, femmes ne représentent qu’un faible pourcentage des employées dans ce domaine.
Inclusivité digitale : les représentations chez Disney
Quand aux autres minorités, comme les personnes racisées ou les personnes handicapées, celles-ci sont rarement mises en avant. Et quand iels le sont, c’est en suivant une sorte de storytelling qui ne leur parlera pas forcément. Toutefois, si Disney a longtemps été critiquable avec son queer-coding et baiting, l’entreprise s’essaye à l’inclusivité. Cela se traduit par une Ariel noire dans la Petite Sirène.
Ou encore avec Slightly, joué par Noah Mattews Matofsky qui âgé de 15 ans est trisomique. Celui-ci tiendra un rôle majeur dans la prochaine adaptation de Peter Pan. Peut-être une tentative de se racheter, après le queer-baiting et pinwashing réalisé avec La Belle et la Bête ? Dans tous les cas, la représentation d’une Ariel à travers la toile a permis de démontrer que les représentations comptent. Comme avec les vidéos de petites filles noires réagissant à la bande-annonce du film live de la Petite Sirène. Les univers de Disney sont souvent très blanc. Et pour une fois, ces petites filles ont pu se voir représentées par le géant américain du dessin animé.
Inclusivité digitale : le net est-il mieux que la « vraie vie » ?
Avec le marketing digital – et plus précisément le marketing à impact – ce genre de prise de position d’une marque telle que Disney va entraîner irrémédiablement un effet boule de neige. À l’heure d’aujourd’hui, le digital est le terreau où l’inclusivité peut fleurir. Avec le fort accès à l’information, avec la capacité aux personnes minorisées de se rencontrer en ligne, ou même de faire avancer les choses en éduquant, on voit être mis en lumière des sujets alors restés dans l’ombre.
La grossophobie, entre autres, souvent oubliée ou moquée, avec l’émergence du Body Positif a permis aux marques de prendre conscience de leur impact. La représentation de personnes grosses dans les médias a toujours flirté avec la moquerie, ou avec l’insulte. La femme grosse est gourmande, alors que l’homme gros est pervers ; les deux forment un ressort comique. Néanmoins, grâce au digital et aux questions sociales, on a pu voir des marques faire des efforts là-dessus.
Le body positive et les réactions sur le net
La mode d’abord, souvent représente de jeunes filles filiformes, qui ne dépassent pas les 20 ans. Le Body Positiv a été une prise de conscience sur ce sujet. Et des marques comme Darjeeling ont mis en avant la diversité des corps. Sur leur site, on peut trouver des femmes plus âgées, des femmes grosses. Ou encore des personnes avec une identité de genre non définie. Derrière cela, la marque veut renvoyer le message que leur lingerie est accessible à tous. Et que leurs soutiens-gorges prennent en compte les différences existant entre les corps.
Cependant, il ne faudrait pas croire que ceci est nouveau. La mode inclusive prend racine dès la Seconde Guerre mondiale aux États-Unis : avec l’objectif d’aider les vétérans et les civiles. Par exemple des manches conçues spécialement pour les personnes en fauteuil roulant. La volonté était d’allier la beauté de l’habit à sa fonctionnalité, afin de permettre aux victimes de se reconstruire et de gagner une certaine autonomie. Cela a permis dans les années 1970 à Levis de s’adresser en particulier aux personnes handicapées, et d’attirer à eux une nouvelle clientèle.
Les efforts récents des marques en inclusivité digitale
Le digital a permis une prise de conscience : les personnes minorisées sont des clients comme les autres. Mais pour cela, il faut que celleux soient représenté·es, parfois sur des domaines où iels ne sont les bienvenues. Comme par exemple le milieu du sport. L’une des actions les plus emblématiques est la marque Gym Shark, qui est devenue l’un des principaux acteurs du vêtement fitness. En 2020, le compte Instagram de Gym Shark poste une photo de Nelly London portant l’un de leur ensemble. Sur la photo de gauche, on voit Nelly l’air morose en train de flex. Sur l’autre, elle sourit et montre son ventre. Cette photo a provoqué un taulé de la part des followers de Gym Shark. Si bien que face aux commentaires haineux et grossophobe, la marque a décidé de répondre. En disant à ses détracteurs de ne plus la suivre.
Représentations et publicité : questionnement autour de l’inclusivité digitale
Cette remarque n’est pas sans rappeler Netflix. Dont le Community Manager a répliqué à un abonné qui se plaignait qu’il « y avait trop de gays » dans leurs séries, que « on ne veut pas de toi dans nos abonnés ». Un tweet cinglant ayant été cités et retweet par un nombre incalculable de personnes. D’ailleurs, avoir l’impression que les personnes gays sont trop représentées à l’écran vient d’un biais cognitif. En vérité, les personnes queers à l’écran ne représentaient que 10.2% en 2020. Et cela était grâce à la série Pose qui mettait à l’honneur des femmes transgenres, jouées par des concernées. Si une certaine catégorie de la population est persuadée qu’il y a trop de queers dans les médias, c’est simplement qu’iels sont victimes d’un biais cognitif. À force d’être tout le temps représenté, quand cela n’est plus le cas, il y a une sorte de décalage.
Dans tous les cas, les marques en termes de communications digitales savent qu’iels ont un rôle à jouer. La marque de rasoir Gilette a décidé de prendre un virage avec sa marque contre la masculinité toxique, afin de déconstruire les clichés sur la virilité et les hommes. Si cela a fait polémique, il reste néanmoins que beaucoup d‘hommes ne se retrouvent plus dans les stéréotypes liés à la masculinité dans les publicités. Mais cela en fait-il une bonne représentation pour autant ? Au moins, Gilette aura ouvert un débat.
L’inclusivité digitale comme outil marketing
Dans tous les cas, est-ce que l’inclusivité digitale est une nouvelle façon de faire du marketing ? Représenter les gens divers et variés c’est bien, mais vendre, c’est mieux. Du moins, c’est ce que la théorie dirait. En pratique, l’objectif d’un spot publicitaire ou d’une affiche dans le métro n’est pas tant de faire acheter le produit, mais de faire en sorte qu’on le mémorise. Avec Gilette et sa publicité contre la masculinité toxique, on a pu constater alors que la marque a fait parler d’elle. Le but était de montrer qu’elle s’inscrivait dans son temps, et ne voulait plus s’orienter vers des discours virilistes.
Ici, l’inclusivité est un outil pour populariser un produit. Un bad buzz, qu’importe s’il est légitime ou non, c’est un moyen de faire parler d’une marque ou d’un produit. De plus, le marketing inclusif vient du souhait du consommateur. Et permet aux marques d’élargir leurs horizons en termes de cibles. Mais pour cela, il faut mettre en place plusieurs règles. Une étude de marché, l’utilisation du langage inclusif, ainsi que l’authenticité, et avoir conscience des préjugés.
Le cas de la marque Moods
Comme l’a fait la marque de culotte menstruelle, Moodz, en ayant créé un boxer menstruel qui s’adresse à toutes les personnes qui ont leur règle. Souvent sur ce sujet-ci, les hommes transgenres sont mis de côté. Avec l’idée reçue qu’ils ne peuvent plus avoir leurs règles, ou encore que les règles ne sont qu’une affaire de femme ; il s’agit d’un biais transphobe. Le choix de Moodz de faire un boxer menstrué, sans préciser qu’il est pour ce public en particulier, et en mettant à l’honneur des hommes transgenres, une mannequin cisgenre, et une personne non-binaire. Enfin, on peut voir sur leur site que l’inclusivité est une revendication, dans le choix de la marque de représenter les corps. Ce boxer vient du constat suivant ; Moodz s’est aperçue que 22% des 18 – 30 ans ne se reconnaissent pas dans la binarité de genre.
C’est l’authenticité dans la démarche qui a permis à son inclusivité d’être un outil marketing redoutable. Tout d’abord, Moodz ne s’adresse pas aux personnes transgenres. Mais la marque les inclut directement dans son public par le biais de ce boxer, tout en indiquant que si une femme cisgenre souhaite en porte un, elle est libre de le faire. Elle n’est ni effacée, ni invisbilisée, elle est libre de son choix.
Conclusion : le double discours de l’inclusivité digitale
Enfin, depuis quelques temps, on a vu la popularité de Harry Styles ou de Timothée Chalamet. Ces derniers représenteraient une nouvelle masculinité, déconstruire, qui se permet de porter des robes ou des crop-top lors de galas. Si cela est un tour de marketing pour embellir le storytelling autour d’eux, on peut se demander de la sincérité. Pourquoi cela marche pour Styles et Chalamet ? Parce que ce sont tous les 2 des hommes cisgenres, blancs, minces, jouant la carte du queer-baiting pour Styles. L’internet se sépare en 2 écoles, saluant leur charme et leur déconstruction, ou au contraire réticent face à cette démonstration. Parce qu’il s’agit avant tout d’une démonstration : lea chanteur·se Sam Smith, personne non-binaire et grosse n’a pas eu droit à ce traitement de faveur. Avant ellui, des artistes « cassant les codes du genre » queers et racisés n’ont jamais eu un tel encensement. Au contraire.
Jouer sur le queer-baiting, ou mettre des crops tops ne font pas de Timothée Chalamet et Harry Styles des « ambassadeurs de l’inclusivité ». Surtout à l’ère du digital, où une bonne maîtrise des réseaux sociaux permet de porter des jupes sans prendre clairement position face aux LGBTphobies.
Rédigé par Indiana Genest
pour Média Institute
Responsable de Communauté chez Alphonse
Auteur du blog : antagoniste.ig