Le branding : qu’est-ce que c’est ?
Lorsque l’on parle de branding, on fait le plus souvent référence à ce qui constitue l’ADN de la marque, les éléments fondamentaux que celle-ci, dans l’imaginaire du consommateur/utilisateur/etc. n’est pas interchangeable avec une autre. Il s’agit du positionnement de la marque.
Celui-ci est constitué par de nombreux facteurs : ses valeurs, sa promesse, son langage, et bien sûr son identité visuelle (logo, charte graphique, etc.). Le branding est absolument nécessaire pour développer une identité forte. Certaines marques y sont particulièrement bien parvenues : Apple, Coca-Cola, McDonald’s, pour n’en citer que quelques unes.
Pour constituer une stratégie de branding efficace, il faut définir l’identité de la marque, son histoire (storytelling), puis faire vivre cette histoire. Le branding, c’est la constance : chaque communication de la marque, aussi minime soit-elle, doit servir l’histoire de la marque, l’entretenir. L’objectif est de créer un lien puissant entre la marque et la cible. Les marques dont la stratégie branding est la plus aboutie parviennent à provoquer un lien véritablement affectif avec les consommateurs. C’est le cas d’Apple par exemple : si les gens font la queue pendant des heures pour obtenir le nouvel IPhone le jour de sa sortie, ça n’est pas à cause des qualités techniques du téléphone, mais bien parce qu’ils sont profondément attachés à la marque et à ce qu’elle représente. Dans la mesure où la décision d’achat résulte la plupart du temps d’un processus inconscient voire impulsif, on comprend la nécessité de créer ce type de lien avec la cible.
Le personal branding
Le personal branding existe depuis bien avant la démocratisation d’internet et des réseaux sociaux, même s’il s’est développé de façon fulgurante depuis leur avènement.
On pense par exemple au monarque Louis XIV, qui a créé autour de sa personne une véritable marque. Se présentant au monde comme le “Roi Soleil”, il a fait créer ce qui pourrait s’apparenter à un logo (un emblème en réalité, mais les logos n’en descendent-ils pas ?) et un château, Versailles, dans le but de présenter sa personne au monde et d’écrire son histoire comme celle d’un monarque absolu et de droit divin. Tous les rois ont leurs statues et leurs portraits, mais Louis XIV a su tirer parti, bien mieux que ses prédécesseurs, de toutes les possibilités qui s’offraient de rayonner non seulement en tant qu’homme mais aussi en tant qu’idée, que concept.
Dans un contexte plus contemporain, il est impossible de parler de personal branding sans mentionner Steve Jobs, le cofondateur d’Apple. Une paire de lunettes rondes et un col roulé suffisent à l’évoquer, et ses discours presque mystiques ont inspiré et influencé les foules.
Avec le développement des réseaux sociaux, les outils du personal branding sont devenus accessibles à tous : LinkedIn et Instagram sont les deux plateformes qui mettent le plus en exergue cet aspect : l’un au niveau professionnel, l’autre au niveau personnel.
Quelle application en politique ?
Comment cela se traduit-il en politique ? Déjà, les partis et les personnalités politiques sont-ils des marques comme les autres ? Le processus de choix que mène un électeur avant de voter est-il comparable à celui d’un consommateur comparant différents produits ?
On l’a vu, Louis XIV (qui, fait amusant, a aujourd’hui son compte Instagram) a en quelque sorte “inventé” le personal branding : d’une certaine façon, on peut dire que le personal branding trouve ses racines dans la politique et qu’il existait bien avant le terme pour le définir. Aujourd’hui, il semble difficile de nier que l’image d’un candidat joue un rôle majeur dans l’intention des électeurs de voter pour lui (ou elle). Si le vote dit “sur étiquette” (c’est à dire le fait de voter en se basant quasi exclusivement sur un parti indépendamment des personnalités le représentant) a longtemps prévalu au moins chez certaines franges de l’électorat (à une époque où les partis bénéficiaient d’une forte légitimité : le Parti communiste après guerre, les partis gaullistes du temps du général de Gaulle, le Parti socialiste des années 1970…), il est beaucoup plus rare aujourd’hui. Parmi les facteurs qui influent sur le choix d’un candidat, nombreux sont ceux ayant trait à la personnalité que celui-ci aura réussi à projeter : est-il ou est-elle honnête ? sympathique ? dynamique ? proche ? Les candidats, conscients de cette mutation, mettent de plus en plus en avant leur personnalité, quitte à parfois s’affranchir de leur parti (surtout si celui-ci est devenu un boulet à traîner).
Aux États-Unis, la victoire de Donald Trump aux présidentielles de 2016 est fortement liée (même si on ne peut la réduire à cela) à la stratégie de personal branding menée par le candidat républicain. Qu’on l’admire où qu’on le déteste, on est forcé de reconnaître que celui-ci a parfaitement cerné ce que ses électeurs potentiels attendaient d’un candidat à la présidence. Il ne s’agissait pas de plaire à tout le monde, mais de plaire à ceux qui étaient déjà susceptibles de voter pour lui, et aux indécis. Sa cible ? Les hommes blancs, assez âgés, peu diplômés et vivant dans des états ruraux. Il a su cerner les désirs et les valeurs de ces électeurs potentiels et a adapté son univers en fonction de cette cible : son phrasé (martelé), son champ lexical (simplifié à l’extrême), sa gestuelle (agressive), son slogan (“Make America great again”, emprunté à Reagan) : tout a été calibré pour séduire sa cible prioritaire. Face à lui, la stratégie de branding d’Hillary Clinton, selon certains analystes, manquait d’impact : son logo a reçu de vives critiques, son slogan “Stronger Together” était peu clair.
Le milieu politique français n’est pas en reste et a lui aussi ses champion.ne.s du branding et du personal branding. A l’extrême droite, Marine Le Pen a su utiliser sa propre image pour redorer le blason de son parti, faire oublier les sorties négationnistes de son père, dédiaboliser le FN, lui donner une image plus lisse, plus acceptable, plus assumable. Lors de la présidentielles de 2017, le nom du Front national n’était même plus présent sur les affiches de campagne, ni même celui de Le Pen, remplacé par “Marine” : juste un prénom, se voulant humain, familier. On note également le symbole de la rose, “emprunté” au Parti Socialiste et repeinte en bleu, qui vient remplacer le logo à la flamme du Front National.
Son clip de campagne la met en scène de façon sensationnaliste : musique de bande-annonce, ralentis, focus sur Marine Le Pen présentée comme une héroïne, crescendo musical, tout y est. Le changement de nom du parti d’extrême droite, devenu “Rassemblement national” en mars 2018, et dont le logo a été lifté pour sembler moins pointu et agressif, est un cas typique de rebranding. Il s’agit encore une fois de modifier la perception qu’ont les électeurs du parti. Les résultats des élections européennes, où le RN est arrivé en tête avec plus de 23% des voix, prouvent à quelle point cette entreprise de dédiabolisation a fonctionné. Au risque d’oublier que l’on vote avant tout pour des idées et un projet de société.
Sources
Personal branding– Avez-vous l’étoffe d’un ROI ?
Personal branding des politiques… et des candidats !
When Branding Was Fit for a King
Louis XIV, ‘Le marketing, c’est moi’
How Did Trump Win? It’s All Down to Political Branding
Portrait-robot de l’électeur de Donald Trump
Qu’est-ce que le vote sur étiquette ?
Marine Le Pen, un regard sur la France de l’autre côté de l’Atlantique
Elections européennes 2019 : explorez les résultats du vote en France, ville par ville
Le Pen-Macron : que révèlent leurs affiches de campagne ?
Marine Le Pen’s rebranding of National Front hits criticism