Comment mesurer l’impact des politiques RSE sur l’engagement des consommateurs ? Donnent-elles davantage de crédibilité ou produisent-elles l’effet inverse ?
Si la RSE est aujourd’hui devenue l’un des enjeux majeurs de la vie d’une entreprise c’est notamment parce qu’elle est étroitement liée à la théorie des « Stakeholders » (Parties prenantes). Pour rappel, cette théorie sous-entend qu’il est nécessaire pour une entreprise de prendre en considération non seulement son activité propre, mais également son environnement au sens le plus large du terme. En conséquence les consommateurs font désormais partie intégrante des réflexions stratégiques et marketing, puisqu’ils peuvent avoir un impact considérable – positif ou négatif – sur le fonctionnement et la rentabilité de l’entreprise.
Les questions relatives au Développement Durable telles que la production éthique ou la transition écologique sont au cœur du débat sociétal depuis environ une vingtaine d’années ; il est donc vital pour n’importe quelle entreprise de revoir sa copie afin de satisfaire et de répondre au mieux aux attentes des consommateurs, qui sont, selon le modèle énoncé par Caroll en 1979 :
- Les responsabilités économiques : La société exige que les entreprises soient profitables.
- Les responsabilités légales : La société exige que les entreprises respectent la loi.
- Les responsabilités éthiques : La société attend des entreprises qu’elles se comportent de façon éthique.
- Les responsabilités philanthropiques : La société désire que les entreprises fassent du bien à la communauté.
En somme, les consommateurs-acteurs attendent désormais de l’entreprise que ses actions fassent « sens » quitte à demander des preuves de son engagement. Cette forme accrue d’exigence trouve son essor dans l’omniprésence du digital et des réseaux sociaux à travers notre société. Comme chacun sait, ces derniers permettent en effet à n’importe qui de se renseigner, d’interroger, ou encore de diffuser un message sur n’importe quel sujet à n’importe quel moment. Selon Joseph Martin pour RSE Magazine « Le digital exacerbe le besoin de sens. Il impose sincérité et souci d’efficacité des actions de marques pour contribuer à rendre le monde meilleur. L’authenticité et la transparence sont cruciales, quand le digital amplifie et sanctionne le moindre écart aux engagements annoncés. » Les entreprises n’ont désormais plus le droit à l’erreur et doivent illustrer et démontrer jour après jour leur bonne foi en termes de RSE.
Pourtant, par esprit de profit et refus du changement certaines entreprises succombent à la tentation du « Greenwashing » et ce malgré la pression des consommateurs. Ce procédé peut se définir comme une stratégie marketing visant à donner une image responsable et vertueuse qui s’avère en réalité totalement factice. On parle également de « Goodwashing » ou de « Wokewashing » lorsque cela est relatif à des questions sociétales ou des injustices sociales.
Cette légèreté témoigne de la méconnaissance des conséquences de ces actes manqués par les entreprises : aujourd’hui les consommateurs n’hésitent plus à sanctionner les marques qui ne s’engagent pas véritablement autour de réelles causes et sont prêts à les « blacklister » voire à les dénoncer sur la place publique (comprendre les réseaux sociaux…) ; ce qui a dans un premier temps pour conséquence l’effondrement de l’image de marque, puis la faillite de l’entreprise.
Selon une étude Edelman Intelligence réalisée en 2019, 63% des Français (de tous âges confondus) désirent pouvoir faire confiance aux marques sur les questions sociétales et environnementales afin de valider leur acte d’achat. Pourtant, seulement 23% d’entre eux déclarent avoir réellement confiance en ces dernières.
Cet écart important prouve parfaitement que les exigences des consommateurs ne sont pas suffisamment considérées par les entreprises : certes il y a eu beaucoup de prises de parole, de campagnes publicitaires, de stratégie marketing mais quand est-il du concret ?
Pour illustrer notre propos, voici quelques exemples d’échecs de campagnes RSE :
- Wokewashing : Mark&Spencer a renommé un sandwich LGBT (Laitue Guacamole Bacon Tomate) pour le Pride Day, sans pour autant s’engager pour la Défense des Droits LGBTQIA+
- Greenwashing : La marque de lessive Le Chat qui promeut une lessive éco-responsable mais ne mentionne absolument pas ses composants chimiques…
- Goodwashing : Lacoste a sorti en 2018 la collection « Save our species » dont le logo crocodile des polos a été remplacé par des animaux en voie d’extinction afin sensibiliser les consommateurs à la cause animale. Pour autant, cela n’a pas empêché la marque de continuer à commercialiser des vêtements et accessoires en cuir…
Il s’agit pourtant de privilégier les actes avant le « faire-savoir », de prendre le temps de se transformer. A ce sujet l’étude TrustBarometer énonce cinq critères d’exigence afin de recréer le lien de confiance entre l’entreprise et le consommateur :
- Être plus honnête avec le grand public (41%)
- Améliorer les contrôles de la qualité (39%)
- Arrêter d’agir comme si faire de l’argent est le seul but de l’entreprise (38%)
- Améliorer le service client (35%)
- Devenir plus transparent à propos de son business (25%)
On estime à 1 sur 2 le nombre de consommateurs qui sont prêts à rester fidèles à une marque si celle-ci s’engage à être réellement vertueuse et à mener des actions concrètes et qualitatives. Aujourd’hui, il est clair que les exigences sociétales et environnementales priment sur le produit et l’expérience.
Comme nous l’avons expliqué précédemment, les réseaux sociaux permettent désormais un « fact-checking » (c’est-à-dire une vérification), opéré de manière quasi-systématique par les consommateurs et plus globalement les internautes. Dans le cas où les engagements énoncés par les marques s’avèrent fallacieux, les sanctions sont terribles.
Ainsi, nous ne pouvons que recommander aux entreprises d’être les plus humbles et les plus transparentes possibles dans leur communication RSE : le consommateur appréciera d’autant plus qu’une marque prenne le temps d’une transformation en profondeur plutôt qu’elle opère un changement radical qui n’aurait ni pertinence ni crédibilité.
C’est à cet instant que le marketing digital et les réseaux sociaux prennent tout leur intérêt : ils ont pour principaux objectifs de développer la notoriété et la réputation d’une marque ainsi que de renforcer l’engagement et la fidélisation des consommateurs. Il apparaît donc essentiel pour les entreprises d’opter pour ces canaux de diffusion car ils disposent d’une fort aspect didactique et permettent une grande créativité à travers les contenus.
Le digital est par conséquent à considérer comme l’outil, le relai voire le tremplin de la stratégie RSE de l’entreprise. D’une part parce qu’il est vecteur de solutions qui favorisent la transition écologique (moins de papier, plus d’informations…) et d’autre part parce qu’il permet d’engager concrètement les consommateurs-acteurs dans le processus de développement RSE en sensibilisant et en les fédérant autour d’une cause : IKEA a par exemple ouvert une plateforme digitale où ses clients peuvent vendre les meubles de la marque en seconde main.
En conclusion, la RSE est bien plus qu’un « argument de vente » : on pourrait désormais évoquer un « argument d’achat » qui valide ou non la décision du consommateur de faire confiance à une marque. C’est ce « contrat de confiance » qui permet à l’entreprise d’être créatrice de valeur, tant au niveau économique qu’aux niveaux sociétal et environnemental. Dans un prochain article nous étudierons la manière dont les marques se servent du digital et plus précisément des social media afin de développer leur stratégie RSE.
SOURCES :
https://ekodev.com/blog/On-en-parle/Influence-des-individus-sur-la-RSE
https://www.ikea.com/fr/fr/customer-service/services/seconde-vie-des-meubles-pub92e7c9c0
https://www.rse-magazine.com/La-RSE-devient-un-enjeu-majeur-grace-au-digital_a3031.html
https://www.rse-magazine.com/La-RSE-devient-un-enjeu-majeur-grace-au-digital_a3031.html